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LA GRAMMAIRE ENFANTINE PAR CLAUDE AUGE 19-01-2011 11:57 к комментариям - к полной версии - понравилось!


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Au début du XXème siècle , le système éducatif français continue d’attribuer une place de choix à l’enseignement de la grammaire. La couverture et la première page de la Grammaire enfantine de Claude Augé , soumises ici à notre attention, en témoignent. Nous noterons que l’absence du numéro et du millésime de l’édition de cet ouvrage, utilisé pendant une trentaine d’années, renforce dès la couverture l’impression d’immuabilité de l’enseignement de la grammaire.
« La Grammaire française nous enseigne à parler et à écrire sans faire de fautes. » Cette affirmation de Claude Augé, énoncée comme une vérité dès la première page de son manuel, nous incite à nous poser deux grandes questions. D’une part, que signifie parler et écrire sans faire de fautes ? Cette interrogation en recouvre elle-même deux autres : que sont la langue et la culture francophones et à qui est destiné l’enseignement de la grammaire ? D’autre part, comment apprend-on la langue française ?


Si ce n’est pas ce qui retient l’attention au premier abord, la maison d’édition Larousse donne les titres de noblesse de l’ouvrage d’un de ses directeurs dès la couverture. Ces titres qui lui donnent sa légitimité sont de deux ordres :
• le tirage, important. A n’en pas douter, ce succès d’édition est en partie dû à l’arrêté du 29 janvier 1890 (année de la première parution de la Grammaire enfantine) qui rendit les manuels obligatoires dans l’enseignement. Nous noterons le souci accordé dès la couverture aux règles orthographiques : mille est écrit en lettres. Son caractère invariable est ainsi mis en évidence. Il ne faut bien évidemment pas exclure que mille est ainsi écrit pour économiser de la place.
• la place tenue dans l’enseignement du français par ce manuel. Le principe jacobin de centralisation ne peut être que souligné : de Paris à tous les pays de langue française, en passant par les départements. Nous noterons que le terme francophonie, forgé en 1880, n’est pas employé ici .
Cette mention sur la couverture informe le lecteur du manuel ou lui rappelle que la langue française est parlée en dehors de la France. Se pose néanmoins la question de savoir ce que sont « les pays de langue française ». S’agit-il des composantes de l’Empire colonial français qui n’ont pas le statut de département (comme l’Algérie l’avait depuis 1848) ou de pays indépendants où le français est la langue d’une partie plus ou moins importante de la population, voire a le statut de langue officielle (par exemple, le Canada ) ?
L’aire où est parlé le français est considérablement réduite dès la première page du manuel : « En France nous parlons le français. ». Cette diminution notable de l’espace francophone et l’emploi de nous esquissent la conception de la culture qu’impose Claude Augé dans son manuel. Cette conception nous semble duelle :
• d’une part, la culture repose sur le fait de « bien parler » et de « bien écrire » dans la mesure où il n’est pas d’accès aux monuments de la culture d’un pays sans compétences (et ici performance) dans la langue où ils sont composés.
• d’autre part, l’emploi de nous (par opposition à on employé pour les autres pays européens cités) associé aux limites géographiques de la France (qu’il faut certainement envisager ici dans ses frontières métropolitaines) introduit la dimension identitaire de la culture non pas francophone mais uniquement française.
Nous comprenons donc ainsi le message que transmet ici en filigrane Claude Augé : notre identité, ce qui nous distingue des autres (on), repose, entre autres, sur notre langue qui, par ailleurs, peut être parlée en dehors des limites de la France. Nous ne serons nous-mêmes qu’au prix de la maîtrise de (performance dans) notre langue, le français. A une période où la France était amputée de deux territoires sur lesquels elle revendique un droit qu’elle pense accordé par l’histoire, cette question prenait une dimension considérable dès l’école (tant dans les manuels de français que d’histoire). Nous noterons ici la place volontairement ou inconsciemment accordée à l’Allemagne dans la liste des pays. Cette liste est établie sans principe particulier, ni alphabétique, ni géographique. L’Allemagne y est pourtant citée en dernier, juste avant la France, comme pour souligner l’opposition.

Qui doit maîtriser la langue française ? Nous, à commencer par les enfants à qui ce manuel, que leurs parents peuvent acquérir pour un prix modique , est destiné (livre de l’élève ).
Tout comme celle de la langue française, la représentation des enfants est double.
• Louis Albert-Lefeuvre, récompensé pour une Jeanne d’Arc dont le caractère patriotique ne saurait être nié, nous donne à voir deux très jeunes enfants : une fillette et un garçonnet qui ne semblent pas être en âge, au début du XXème siècle, d’être scolarisés. Ces deux enfants, dont la mère prend beaucoup de soin (ils sont bien en chair, propres et bien coiffés, très bien habillés), lui demandent avec insistance le pain qu’elle est en train de couper. La mère, dont les formes sont assez généreuses, rappelle la semeuse d’Oscar Roty et celle que Larousse utilise comme emblème depuis 1890. Nos recherches sur Louis Albert-Lefeuvre nous ont permis de préciser que cette composition n’illustre pas un thème lié à l’éducation mais est une allégorie de l’abondance d’une France essentiellement agricole qui sait prendre soin de ses enfants. Il s’agit d’un groupe intitulé Le Pain . La forte envie des enfants de manger du pain (qui restait, en ce début de XXème siècle, la base de l’alimentation dans les campagnes), aurait été transformée en soif de savoir, qui doit être en partie transmis dans le cadre familial.
• La première page du livre nous offre un dessin soigné aux motifs bucoliques (qui rappelle les fioritures du cadre de la couverture). Les enfants représentés sont plus âgés que ceux de la sculpture de Louis Albert-Lefeuvre. Tout comme eux, ils sont poupins et très soignés. Leurs vêtements trahissent qu’ils appartiennent à une autre catégorie sociale que les paysans de la composition de la couverture. Une fillette, qui semble ici encore l’aînée, apprend à lire à un garçonnet, sans doute son frère. Les positions et les poses de chaque enfant sont révélatrices. La fillette est assise en hauteur, de la main droite elle indique une ligne du grand livre qu’elle tient sur ses genoux, de l’autre elle fait un geste qui n’est pas sans rappeler celui que pourrait faire un prêtre (ce qui dans le contexte de la séparation de l’Eglise et de l’Etat peut sembler étrange, voire déplacé). C’est elle qui détient la connaissance et la transmet, comme la mère de la sculpture tient le pain et le donne à ses enfants. Le garçonnet semble très concentré dans un mouvement très légèrement tendu vers le livre.
Ces illustrations donnent donc à comprendre que la grammaire est aussi vitale à la vie que le pain et que son apprentissage est nécessaire à tous les enfants, quelle que soit leur appartenance sociale.

Les enfants doivent donc apprendre La Grammaire (avec une majuscule) grâce à ce Premier Livre de Grammaire. Cet adjectif a un caractère définitif qui n’est pas sans rappeler la couverture des premiers Bescherelle de conjugaison .
Le contenu du livre est indiqué sur la couverture (cette méthode de publicité n’a rien d’étonnant ni à l’époque ni aujourd’hui). Nous remarquerons que le plan de travail est nettement plus détaillé et large que celui proposé dans la grammaire de Noël et Chapsal . La variété des types d’exercices proposés répond à la définition de l’apprentissage de la grammaire donnée sur la première page : parler (élocution, lecture, fables, historiettes et poésies) et écrire (copies et rédaction) sans faire de fautes. Bien parler et bien écrire est un objectif qui met l’accent sur la performance de la production. En l’absence de toute mention à la compréhension, il semble que cette dernière découle naturellement de la production.
Nous noterons par ailleurs que le nombre de règles n’est pas donné. La quantité d’exercices d’application (des règles) est proportionnellement plus grande que celle des exercices des autres types. Le regroupement et l’ordre des différentes composantes du manuel (à l’exception des deux premières) restent pour nous obscurs. Nous ne comprenons pas, par exemple, pourquoi l’analyse (certainement logique) n’est pas placée entre les règles et les exercices ou après les exercices ; pourquoi les fables et les poésies sont séparées par les historiettes ; pourquoi les exercices d’élocution sont regroupés avec les rédactions. Le manuel est richement illustré de gravures qui sont certainement le support des rédactions.
La première page propose deux exercices qui ne sont pas numérotés : lecture et leçon. Le support de la lecture est une leçon dont le contenu va de l’élément complexe (la langue) aux éléments simples (les lettres) et est répétitif. Dans le texte, l’objectif de l’apprentissage de la grammaire est donné deux fois : bien parler et bien écrire. Le questionnaire reprend les points du texte dans l’ordre exact dans lequel ils sont présentés. Les questions ne sont que les formes interrogatives des phrases affirmatives du texte . Ce questionnaire a donc une fonction de répétition/révision.
Au bas de la première page se trouve un exercice de conjugaison. Il nous semble étrange que cet exercice soit placé ici (même s’il s’agit du verbe avoir) dans la mesure où la conjugaison est donnée page 70 et où le verbe avoir n’est pas employé une seule fois sur cette page.


La Grammaire enfantine de Claude Augé est un des ouvrages qui permet d’envisager le XIXème siècle et le début du suivant comme le siècle de la grammaire scolaire. La grammaire y est conçue comme l’outil, presque unique puisqu’elle réduit à l’état d’auxiliaire la littérature (ici représentée par les fables et les poésies), de l’apprentissage d’une langue présentée comme un des éléments essentiels de l’identité nationale mais aussi partagée par d’autres peuples.
A l’époque où Claude Augé vend « un million 940 mille exemplaires » de sa Grammaire enfantine, Ferdinand Brunot remet en cause la domination de la grammaire dans l’enseignement et proclame que « l’école doit enseigner la langue et non la grammaire » . La révolution qu’il proposait au début du siècle précédent convainc lentement.

 

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